12 avril 2023
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Philippe Bouvatier nous a quittés

Victime d'un double accident vasculaire cérébral en décembre dernier, Philippe Bouvatier, 58 ans, est décédé dans la nuit du 6 au 7 avril 2023 à Bois-Guillaume. Au centre de rééducation des Herbiers, alors qu'il était partiellement paralysé, son courage et sa volonté avaient payé puisqu'il était parvenu à retrouver l'usage de la parole. Ce fut là un ultime espoir. Toute la famille du vélo, ses copains du peloton Bruno Cornillet et Thierry Marie en tête, envisageait une suite bien meilleure. Mais le destin en a finalement décidé autrement.

IL AVAIT PRESQUE TOUT GAGNE  CHEZ LES AMATEURS

Chez les jeunes, après des débuts à l'EC Malaunay, il pouvait tout se permettre. Et même d'attaquer quand il le voulait, où il voulait. Sa notoriété va d'ailleurs vite s'établir. Après avoir fait moisson de bouquets chez les cadets, on le dirige chez André Boucher, le maître du contre-la-montre, l'ancien mentor de Jacques Anquetil. Et de fait, après un passage au Rouen CC, il signe à l'AC Sotteville pour sa seconde année juniors. Résultat : aux 20 succès annuels en moyenne, vient s'ajouter un titre de champion de France à Annemasse, un an après une troisième place au championnat du monde de la catégorie à Leipzig (Allemagne). Leader d'une riche génération mais ne manquant pourtant pas d'adversité, il domine le Maillot des Jeunes, remportant plusieurs régionales et la finale contre-la-montre à Pont-Audemer avant d'inscrire également à son palmarès le Duo Normand,  associé à Bruce Péan.

Mais il ne reste qu'un an à l'AC Sotteville pour se diriger vers le VC Barentin en seniors. Aussi bien sur les classiques que lors des courses par étapes, 1983 fut une année faste pour lui, remportant Paris-Mantes, Paris-Auxerre où ses premiers poursuivants étaient pointés à trois minutes, le Circuit de l'Aisne, deux étapes de la Ronde de l'Izard et le Grand Prix des Nations sans oublier une deuxième place au Grand Prix de France et au championnat de France des comités contre-la-montre. De quoi le placer au sommet du cyclisme amateur français. Un position qu'il continua d'occuper l'année suivante. En 1984, il frappait les imaginations en claironnant son intention de remporter Paris-Evreux. Pareille prétention l'avait inévitablement désigné comme l'homme à battre pour ses 150 adversaires. Et pourtant, il les battit tous en haut de la côte Henry Monduit, résistant à l'ensemble de la meute. Il ajouta une seconde classique normande en remportant Paris-Lisieux avant de défendre les couleurs françaises aux JO de Los Angeles au côté de Thierry Marie, terminant sixième du contre-la-montre par équipes.

PROFESSIONNEL PENDANT ONZE ANS

Cette notoriété lui permit en août 1984 de rallier le camp de Cyrille Guimard sous les couleurs Renault-Elf. Après avoir tout gagné chez les amateurs, il n'a jamais réussi chez les pros à confirmer les énormes espoirs que ses performances d'adolescent avaient fait naître. Mais il faut dire que plusieurs chutes et mauvais coups du sort sont venus se mettre en travers de son ambition. Il avait pourtant, pour ses débuts, pris la deuxième place du Tour de l'Avenir, étant d'une aide précieuse pour défendre la place de leader de son leader Charly Mottet. Puis il "s'exila" sous les couleurs espagnoles BH en 1986. Lors d'une étape pyrénéenne du Tour de France, personne ne s'attendait à le voir surgir en haut de Guzet-Neige. Mais pour son malheur, alors qu'il avait lâché Robert Millar, une erreur d'aiguillage à 200 mètres de l'arrivée ruina son travail et le priva de la victoire d'étape, celle-ci revenant à l'Italien Ghirotto. Bouvatier semblait maudit. En 1990, une opération d'un rein remet en cause toute sa saison et le prive du Tour de France. Un an plus tard, une fracture du nez suite à une chute au Midi-Libre le laissait à nouveau sur la touche. Cependant, en remportant la Polynormande puis une étape du Tour de la CEE devant Etienne De Wilde et Laurent Jalabert à Valkenburg (Pays-Bas) en 1988 , il décrochait ses deux premières victoires à l'étage supérieur. En 1992, une victoire sur une étape du Tour Méditerranéen à Antibes était venue lui mettre du baume au coeur avant de prendre la 17e place du Tour des Flandres. Sa carrière s'arrêta sur un coup du sort en 1995 lors de l'arrêt du Groupement.

Les années n'avaient en rien altéré sa passion du vélo. Il fut durant huit ans le président du club de Lamballe en Bretagne. Depuis plusieurs années, il était membre du comité de direction de l'Amicale du cyclisme pour le compte de laquelle il avait effectué de nombreux parrainages.

Patrice Meunier